Au départ, je t’avais choisi pour une raison totalement dénuée de noblesse : le cuir sombre, ça ne craint pas le vomi d’enfant. Nous emménagions dans l’appartement que nous venions d’acheter, avec notre petit garçon de 18 mois, et je m’inventais le nid idéal pour cette famille en construction. Le canapé en cuir, tout un symbole.

Depuis, tu m’accompagnes…

Te souviens tu des heures alitées, le ventre qui tire, la forme d’un pied minuscule qu’on devine sous la peau ? Ce retour à la maison, une toute petite fille dans les bras, s’asseoir tous les trois pour la contempler.

Ces matins pleins de biberons de chocolat et de brioche écrasée, Peppa Pig en fond sonore.

Ces nuits sans sommeil, quand le petit être hurlant a enfin rendu les armes mais qu’il semble bien présomptueux de tenter de le reposer dans son lit.

Ces apéros avec les copines où les bouteilles de vin blanc s’enchainent en même temps que les confidences.

Cette arrivée à Bordeaux, “on va prendre l’appart’ de Saint Genès, on ne pourra jamais monter le canapé dans celui des Chartrons”.

Ces dîners devant la télé, à s’agacer contre un politique ou à s’amuser des facéties d’un humoriste.

Ces moments, le soir, quand ils dorment enfin, se poser sur tes coussins tendres, un plaid sur les genoux et ma tête au creux de son épaule.

Puis…

Ces soirs d’amertume, la certitude au fond des tripes, la fin qui rôde.

Cette nouvelle maison, cette nouvelle vie.

Ces après-midi de rien à binge watcher Netflix en retour de cuite tandis que le pluie tambourine sur le velux.

Puis…

Ce premier baiser, le consentement timidement vérifié, avant la douceur.

Ces retrouvailles lubriques, après quelques jours ou seulement quelques heures, quand la chambre est trop loin et le désir trop brûlant.

Et toujours ces enfants malades qui viennent trouver refuge sous une couverture, et ces piles de linge propre à plier. La vie, quoi.

Céline