Il ne m’a laissé qu’un philomenstera. Une plante verte avec des feuilles en forme d’oreilles.
Il m’avait abordée au cours d’une soirée où je ne connaissais personne. M’a-t-il dit son nom ? Je ne sais plus. Je me souviens seulement qu’il était passionné de botanique. Je l’ai écouté. Il a dû prendre cet intérêt pour une invitation. Le lendemain soir, il sonnait chez moi avec une plante verte sous le bras. « Vous aimez mes oreilles de philomonstera ? » J’allais lui fermer la porte au nez, mais en regardant bien, les oreilles de mon botaniste m’ont séduite. Je l’ai laissé entrer et me suis abîmée dans son jardin secret. On a connu des crépuscules sensuels au parfum du jasmin, ; des matins frais où l’hibiscus rouge se balance au vent ; des après-midis à effeuiller la marguerite. Il me parlait de roses rouges et de myosotis, m’offrait des orchidées. Mais un jour l’appel fauve des fleurs du mal s’est fait entendre. La fleur de colchique a remplacé le magnolia. La cigüe s’est implantée. Son jardin, j’ai quitté. D’un seul coup toutes les fleurs se sont fanées. L’image du botaniste s’est effacée.